Au cours de cette journée, trois périodes ont été abordées et expliquées.
La première de 1939 à 1943, période au cours de laquelle Shatta et Bouli Simon, la place devant la maison des enfants porte aujourd’hui leurs noms, ont accueilli, protégé et éduqué des centaines d’enfants orphelins ou dont les parents étaient déportés.
La deuxième, pendant laquelle à partir de 1943, les enfants ont été cachés et protégés par de fausses identités, chez les habitants de Moissac et des environs. Aucun n’a été dénoncé, alors que les Moissagais savaient leur existence. Moissac ville de Justes…
La troisième après la libération quand le moulin a servi de lieu d’accueil et d’école pour tous ces enfants dont la plupart ne reverraient jamais leurs parents, victimes de la barbarie nazie.
Les uns et les autres se sont ensuite attachés à définir ce qu’est un Juste parmi les Nations, titre réservé aux non-juifs qui ont sauvé des juifs de la Shoah au risque de leur propre vie.
Ce colloque placé sous le patronage du président de la République et du président du Sénat a pu voir le jour grâce à la participation de nombreux bénévoles emmenés par Jean-Claude Simon et Annie-Claude Elkaïm, grâce à la mairie de Moissac, au Conseil général, au Conseil régional, à la Fondation pour la mémoire de la Shoah, au Comité français pour Yad Vashem et au Crédit Mutuel.
Le journal télévisé régional de France 3 a été diffusé en direct du Hall de Paris lors d’une édition spéciale consacrée à cette page héroïque de la vie moissagaise.
Discours d’ouverture de Jean-Paul Nunzi :
Qu’est-ce qu’un juste ?
Un juste c’est un non juif qui pendant cette période terrible entre 39 et 45 a sauvé des juifs. On voit ici les justes moissagais, ceux en tout cas qui ont reçu cette médaille…il y en a eu quatre ( Alice Pelous, Manuel Darrac, Henriette Ducom et jean Gainard).
Mais on le sait tous ici, si autant d’enfants juifs ont été sauvés dans notre ville c’est que la ville recelait bien d’autres justes, tous ceux qui se sont tus, tous ceux qui, par des petits gestes quotidiens mis bout à bout ont eu de véritables actes de résistance civique….
En ces temps de dénonciation généralisée et de bassesse pas un ici n’a parlé.
Tout le monde savait pourtant que cette maison était une maison juive et les enfants de Moissac n’étaient pas à proprement parler « des enfants cachés ». Je sais que vous en parlerez au cours de ce colloque, ils allaient à l’école, ils jouaient sur les bords du Tarn.
Mais, le travail de Shatta et Bouli Simon, leur courage, leur force, leur conviction n’aurait servi à rien si un seul moissagais avait parlé, si un seul moissagais avait dénoncé ou en tout cas s’il ne s’en était pas trouvé comme le commissaire Capdordy pour prévenir la « Maison » quand une rafle menaçait.
La ville entière (et ça aussi vous l’évoquerez aussi dans vos tables rondes) cachait des juifs bien au-delà de la maison, des familles entières : la famille Cohn Bendit entre autre, dont Gaby est ici je crois, la famille Milstein , la famille Simon et bien d’autres. Les sœurs de la miséricorde cachaient aussi des enfants juifs…
Alors, pourquoi ce qui s’est passé à Moissac n’a pas dans l’histoire, pris la place qu’elle aurait dû ?
François Hollande, qui vous le savez, soutient cette manifestation, disait l’année dernière en inaugurant le mémorial de Drancy « l’histoire met parfois du temps à trouver sa place ». Il en est ainsi de Moissac. Véritable mythe dans la petite, mais internationale communauté des enfants cachés, (dont une grande partie est là aujourd’hui) notre ville, héroïque d’une certaine manière, n’a pas reçu l’hommage collectif qu’elle devrait.
Souhaitons que ces rencontres permettent, que l’histoire de Moissac, si exemplaire, si porteuse d’enseignements, de mémoire et d’espoir, ne soit pas oubliée et que Moissac reçoive ce « diplôme d’honneur collectif ,» que seuls, dans le monde, Niewlande au Pays bas et Chambon sur Lignon ont eu l’honneur de recevoir. Et c’est pourquoi, je suis très heureux que Mme Eliane Wauquiez-Motte , la maire du Chambon nous ait fait l’honneur de sa présence aujourd’hui.
Mme Wauquiez-Motte, puisque votre ville et la nôtre ont un destin commun, un esprit de résistance et courage, soyez la bienvenue à cette tribune.